Je colle des photos stockées retrouvées au hasard du grenier digital dans le bordel des dossiers du bureau virtuel, je les donne aux enfants, je suis parfois dessus. Je leur montre ce qu’ils étaient autrefois, justement quand ils étaient enfants, sans leur dire pour autant que j’aurais bien aimé qu’ils s’arrêtent un peu plus longtemps à chaque étape, pour savourer le sérieux qu’ils montraient à toutes les découvertes avec des grands yeux. Garder un enfant de six ans pour toujours sera peut-être une (...)
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Impuissances
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De l’avantage d’être plus vieux, comme le temps en automne
24 novembre 2021, par Grosse Fatigue -
Pierre Lazuly est mort
7 avril 2021, par Grosse FatiguePierre Lazuly est mort. Je l’ai appris deux ans plus tard c’est-à-dire hier après-midi, par un lecteur de la grande époque du Rezo. Comme à chaque fois qu’un vivant se volatilise, je lui parle dans ma tête, à la manière des enfants qui vivent encore en nous. Je sais bien que tu es là, Yann, dans ma tête, même si je ne t’ai jamais vu, jamais connu, et que je ne sais pas vraiment ton vrai nom. Les morts sur internet se comptent par milliers. Je vais parfois sur le compte FB de mon neveu pour ajouter des (...)
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Un certain ratage
18 janvier 2021, par Grosse FatigueJe n’avais pas la conscience précise quand j’ai fait des enfants. Je veux dire que je n’avais pas compris - un peu comme ceux qui ne veulent pas d’enfant - que "faire des enfants", c’était faire des adultes aussi. Les enfants passent et s’en vont, il faut commencer à s’habituer aux départs et aux absences. Parfois j’envie les femmes qui n’en ont pas voulu même si la nouvelle femme de ma vie actuelle me rappelle à l’ordre en remettant les choses à leur place : les enfants sont des adultes à venir. J’ai (...)
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L’exil intérieur
2 décembre 2020, par Grosse FatigueJe fais du vélo sur internet pour passer le temps avec des centaines d’excuses surtout liées au mauvais temps même si le temps n’est pas si mauvais sauf celui qui passe. Je n’aurais jamais cru qu’il envahirait tout même l’amour ou ce qu’il en reste. La première fois que j’ai mis les doigts sur le clavier gris d’un PC, et que l’on m’a dit "Tape enter", j’ai préféré en rire et attendre que les deux Steve aillent faire un tour chez Xerox à Palo-Alto pour y voler des idées dans l’air du temps et m’acheter plus (...)
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Un adieu prévu
1er décembre 2017, par Grosse FatigueIl y avait son copain un peu trop gros et gras et pas rasé qui faisait crade et qui avait l’air triste et avachi. Il savait à l’avance. Il m’en a parlé en juin, quand on lui a retiré un truc dans la tête, une métastase dans la tête, quand on peut la retirer, on la retire. Il y avait donc ce peintre en bâtiment, tout triste et gras qui était là, qui était triste, et les murs blancs autour, standards.
Il y avait ma sœur, et puis mon autre sœur, sa mère. Il y avait sa sœur. J’avais envisagé tout cela dans (...) -
Lionel Jospin et moi
22 août 2016, par Grosse FatigueJe le vois depuis la semaine dernière. Ce matin, à la supérette, il était derrière moi, à la caisse. Son garde du corps le suivait des yeux, ou bien était-ce un voisin ou un admirateur. J’ai tout de suite vu que c’était lui, mais ça n’est qu’en payant que j’ai fait semblant d’être étonné. Je me demandais s’il m’avait reconnu. Mais bon.
Je le revois à la télévision le soir où le petit n’avait que deux ans, qu’il annonçait quitter la vie politique, et que le borgne était au second tour. Quatorze ans plus tard, je (...) -
Le père
29 avril 2016, par Grosse FatigueLe premier mai, mon père sera mort depuis vingt-huit ans. Autant d’années qui peuvent faire d’un enfant un homme, et d’un homme mort un homme oublié.
Je revois mon père en ce samedi de 1988, le printemps à travers les rideaux de l’escalier dans la maison sombre que nous habitions et que j’habite parfois encore en rêve tant les rêves sont peuplés de maisons et de chats. J’entends le silence et la nuit passée, quand j’ai dormi à poings fermés, en sachant que mon père serait mort le lendemain. Je me (...) -
De la burqa en milieu humide
7 avril 2016, par Grosse FatigueSur la plage abandonnée, près de Montpellier, entre lac et mer, entre sel et terre, les gamins bronzés dans l’eau, les parents affalés fatigués, sous un soleil de plomb. J’étais parti marcher, parce que la plage, il faut dire que ça m’ennuie. Je regardais les corps et les visages, les attitudes et le paysage, je comptais les tatouages pour créer une sensation statistique : dix-sept pour cent des corps étaient ainsi parsemés de mauvais goût, et je pensais à Auschwitz en plein été. La servitude volontaire (...)
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Des histoires de voyous
22 mars 2016, par Grosse FatigueIls l’ont fait et le feront encore, quelques assassinats au nom d’un mensonge millénaire, d’autres l’ont fait avant eux, pour les mêmes causes ou de vagues raisons, l’ensemble de tout cela se rapportant à des croyances, c’est-à-dire le plus souvent à du vide camouflé dans un emballage de peurs et de merveilleux.
Personne pour nous dire que nos combattants de dieu ne sont que de petits voyous qui, selon l’âge, se refont une virginité passant du pétard à la pétarade, et se suicidant en espérant tout (...) -
La fin des choses
10 mars 2016, par Grosse FatigueJe n’avais pas ouvert mes photos numériques depuis qu’elles dormaient sur un disque dur. De disques durs en disques durs, elles dormaient là, pour toujours. Et puis me voilà à essayer de sauvegarder des choses, tout en préparant un cours, et en écoutant Brad Meldhau. Je suis éparpillé, c’est mauvais signe.
Ce matin, la petite allait bien. On a parlé dans le langage qui ne veut rien dire. Je lui ai dit qu’on allait vers le printemps, elle n’a pas répondu. En ouvrant le frigo, je me suis dit qu’il (...)