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Des gens plein d’enthousiasme

lundi 6 février 2012, par Grosse Fatigue

J’ai eu du mal à comprendre ce qui n’allait pas dans cette énième campagne présidentielle de ma vie. J’en ai connu beaucoup maintenant. Je me souviens presque de celle de Giscard à la mort de Pompidou. J’étais au CP mais j’avais vraiment l’impression que le luxe, c’était une Citroën. Pas une 2 CV mais une SM avec Yves Montand dedans. Je l’avoue : je ne me suis jamais guéri des années soixante-dix. J’y baigne encore parfois et si l’on me disait tiens, on y retourne, je n’hésiterais pas une seconde. Je pourrais alors échafauder un plan pour que David Guetta, ma bête noire, soit privé de ses deux bras encore bébé, afin que l’avenir ressemble à autre chose, du moins à l’oreille. (Un accident en allant chercher du jambon chez un charcutier maladroit ?).

Giscard allait bouffer chez les Français à Noël. Je l’attendais. Un soir, on est allé chez des amis de mes parents à un kilomètre de chez nous. Entre eux et nous, il y avait Giscard. Il dînait là. Chez un militant UDF con comme ses pieds (SIC), dont le garage était placardé d’affiches de Giscard. Je n’ai découvert Jimmy Hendrix que plus tard et donc bien après sa mort. Je regrettais déjà que le temps passe si vite. Le giscardien en question était toujours très propre et ses enfants aussi. J’en concluais rapidement que les bourgeois sont des gens très tristes.

Je me souviens très bien du "Au revoir" de Giscard. En deux mots, le sale petit garçon nous disait très clairement "Vous l’aurez voulu". Ma mère fut effrayée par l’image de Mitterrand qui apparaissait ligne par ligne le soir du second tour. Elle était de droite bien qu’elle essaya de nous faire croire, sur la fin, qu’elle avait toujours été du côté du peuple. Ma mère, quelle plaie. J’étais en troisième en 81. En classe espagnol, avec les nuls, vingt-neuf élèves. Deux redoublants. Quatre passages en seconde. Trois bacs. Les punks se foutaient bien de Mitterrand. Les profs étaient contents et mon beauf, qui travaillait dans l’industrie, y voyait l’oeil de Moscou. Ma sœur est morte avant de le voir vieillir, ce qui est regrettable : ce type a toujours été vieux. Elle aurait dû rester. Ça n’aurait rien changé ni pour lui ni pour elle. Ils avaient mauvais goût et il aimait les barbecues en parpaings et les thuyas autour du pavillon.
En 81 je n’avais guère d’idées politiques. Et puis j’ai vu Jack Lang. J’ai compris que c’était sans espoir. Je l’ai d’ailleurs revu depuis, un soir, dans un cocktail ou je voulais lui rire au nez. Il avait déblatéré pendant deux heures sur la jeunesse. Et puis il était seul, là, en province, au buffet, avec ses cacahuètes. J’avais devant moi la mitterrandie ratatinée, celle qui aurait bien aimé avoir l’air, mais qu’avait plus l’air du tout. Il m’a dit : "C’est toi GF ? "
J’ai répondu oui.
Il m’a dit : "Pas terrible ton petit site. T’es vraiment minuscule."
Comme il avait raison, je me suis mis à pleurer devant tout le monde. A l’époque, parce que c’était la mode, je m’étais fait un pin’s "GF !" en plastique recyclé. J’y croyais. Lang m’a regardé, j’ai cru qu’un autre Lang allait sortir de son corps et me trancher la tête. "T’es vraiment un naze de province !".
J’ai couru dans les couloirs. Et j’ai pleuré dans les chiottes. J’y pense à chaque fois que je passe Place des Vosges, après être allé faire un tour à la MEP.

Le reste est du réchauffé. Le Jean-Marie en épouvantail, sa fille en embuscade, de la métaphore guerrière à coup sûr. Chirac la France, qui plaisait tant à des types sympas que je connaissais, parce qu’il avait, comme eux, l’entourloupe légère, à la française.

Depuis Sarkozy, que j’ai vu en meeting avec Raffarin et qui s’est révélé moins intéressant que lui (c’est dire vous imaginez un peu : Raffarin plus intéressant que qui que ce soit ? ), donc, depuis l’autre, il n’y a plus rien à espérer. D’ailleurs, les candidats ne promettent plus guère, ils ne font que compter le magot. Plus d’enthousiasme, plus de "vivre-ensemble", pas d’idée de nation ou de république, ni de peuple, ni vraiment de laïcité comme rempart contre tous les cons de tous bords qui sont si nombreux à faire chier.... Aujourd’hui, la France est au monde ce que la Corrèze était à l’Europe en 70. Jimmy Hendrix était déjà mort, il était trop tard pour espérer, et pourtant, la mode des cheveux longs a duré encore au moins dix ans, dans mes souvenirs.

J’aimerais bien être anarchiste à nouveau à condition que ce soit un mouvement de fond venant de l’étranger. Ça changerait de mouvement, ça changerait de fond. Ça changerait le fond aussi. Les mouvements de fonds de l’étranger, on n’en parlait pas quand Montand roulait en SM. 

J’aimerais être enthousiaste. Croire aux maisons en paille. [1] Croire à l’énergie éolienne, à la fin du nucléaire.

Au retour des années 7O avec les riffs de guitare qui iraient bien.


[1Le première maison en paille de France, 1923, est à vendre ! Achetons-la !