A quoi sert l’Education Nationale ?

1977.

En sixième, j’avais déjà décroché des maths autant que d’autres décrochaient des médailles. Je me souviens du conseil de classe du premier trimestre. Le prof de maths, monsieur Taillefer, m’a dit : "Fatigue, t’es nul en maths". A l’époque, j’ai pris cela comme un compliment. C’est pour cette raison que je comprends mieux les cancres. Je cultive mon cancrisme comme d’autre leur tantra. J’ai repris les maths vingt ans plus tard, sans grands résultats. Je regarde ce type en nœud papillon parler de mathématiques. Je ne sais pas si les mathématiques préservent du regard des autres. Mais porter un nœud papillon à l’époque du tatouage total, quel anticonformisme ! Je suis aussi très nul en musique. Le dernier quintet en date a changé de batteur. J’aurais dû tout revendre et laisser tomber, mais je recommence à travailler mon tempo en pure perte, tempo en pure perte, une phrase qui swingue à mon goût.

2013.

En sixième, ma fille a seize de moyenne partout. Même en français, où il lui est pourtant difficile de faire moins de trois fautes par phrase. La professeur de français nous précise : "Ne vous inquiétai pas si vos enfant font des fautes d’orthografe, aujourd’’hui, tous le monde en fé. Sa nez pas grâve. Il y a des corecteurs d’ortografe et sa n’empèche persone de trouvé un travaille."

Je vous jure que c’est vrai.
J’imagine que les quatre millions de chômeurs ne le sont pas pour des raisons orthographiques, mais cet optimisme impétueux me semble des plus absurdes...

Elle insiste : "Il ne fo pas culpabilisé l’enfan. L’importan, ces qu’il puissent exprimé ces idés à lui."

Quelles étranges idées aurons-nous quand notre vocabulaire alignera uniquement quelques phonèmes SMS éparpillés entre le néant et son espérance ?

Ma fille me dit que cette prof est complètement folle. Mon fils me l’a dit il y a deux ans. J’en conviens. Voilà donc l’explication à tout. Voilà pourquoi les élèves ne lisent pas. Tout ne vient donc pas que des parents imbéciles de la classe moyenne dans leurs pavillons à la con. (Racisme de classe). L’Education Nationale a recruté cette dame. Elle est pourtant sans doute inspectée par un inspecteur qui lui fout la trouille de temps en temps. Elle tient ce discours devant le proviseur qui ne lui en veut guère. Il y a sans doute d’autres professeurs de ce genre. Des professeurs qui ne font pas de faute eux-mêmes mais estiment utile de ne pas terroriser les enfants avec des règles absurdes. Il convient d’oublier les règles pour mieux les dépasser. Encore aurait-il fallu les connaître mais bon.

Cé vré que c pas grave tt ça. On na si pe de chauses à ce dire aujourd’hui : que des injures en somme. Fo pas sétoné si linjure a de bôs jours devant soi. Comme la vie devant soi mais en moins ambitieux.