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La bonne femme

jeudi 18 février 2016, par Grosse Fatigue

Tiens, regarde-donc, c’est d’elle dont je t’ai parlé ! Hein, Gisèle, c’est lui qui n’y croit pas dit-elle en me montrant du doigt, c’est lui ! Elle me présente à Gisèle, Gisèle a la cinquantaine luisante à peine, je veux dire la couche du derme déjà bouchée par cette volonté objective de ne pas montrer la sécheresse superficielle, cette envie d’artifice pour y croire encore, après avoir passé la barrière de l’âge. Elle me salue très polie, Gisèle, puis au bout d’un moment, de deux ou trois banalités, après tout, on est au boulot, elle demande à l’autre mon signe astral, ce à quoi je réponds moi-même en prenant l’initiative, que je ne connais pas mon signe. Elle n’a qu’à deviner : ça sent la conne.

Ça sent la conne et ça me rappelle ma mère, tarot et médium et je devine l’avenir et même que d’autres vieilles lui donnaient des billets de cinquante francs pour la remercier d’avoir dit n’importe quoi : tout plutôt que la solitude ! J’imagine que Gisèle adore faire son intéressante en nous faisant croire qu’elle nous connaît elle qui ne connaît sans doute rien à rien. J’avance prétentieux l’argument scientifique de la Tour Eiffel, un argument qui vaut son poids : si les planètes avaient de l’influence sur nos personnalités de par leurs masses, alors la Tour Eiffel en aurait aussi sur les habitants qui l’entourent, mais aucun théoricien fumeux pour pondre ça et inventer la massologie™.

Gisèle me répond quelque chose du genre "chacun ses goûts", et les astrophysiciens et les astrologues rajoute-t-elle n’utilisent pas les mêmes cartes du ciel (l’univers est d’une platitude), alors effectivement dit-elle encore, sans compter les erreurs de calendriers et la découverte de planètes naines mais ça ne veut pas dire que l’on n’a pas raison, chacun ses goûts à nouveau, vous n’êtes pas obligé de me croire mais à voir votre tendance à ne rien croire en rien (SIC), vous êtes sans doute Taureau.

"Ailé", taureau ailé, créature mythologique qui en vaut une autre. Elle me dit : "Ah, vous voyez, j’avais raison ! "

Je continue dans le délire : "Ascendant scorpion".

Elle répond : "J’en étais sûre !"

Bien évidemment.

Il faut aux bonnes femmes des religions avec à l’intérieur des faux calculs qui leur donnent la possibilité d’avoir des amis. L’important est d’y croire. Ça ne serait pas bien grave, celle-ci est totalement inoffensive, cantonnée à des tâches sans importance, et j’ai tendance à ne pas la plaindre, et même à la comprendre, tout cela est de l’ordre de l’occupation de l’esprit, et même d’une sorte de libération : elle est utile aux autres.

Il faudrait que je réfléchisse à un moyen d’inventer une autre croyance, un truc idiot mais simple, à la Paolo Coelho, du Voltaire pour mémère mais sans la noblesse.

Je cherche.

Amen.