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Pétition : pour un retour de l’amour.

mardi 2 décembre 2014, par Grosse Fatigue

La platitude est bien entêtante, et pas seulement pour les grimpeurs. Je suis plutôt grimpeur.

Alors le retour de Sarkozy le clown qui passe dans ton village tous les jours à la radio et à la télévision, alors : ça me laisse froid. Tout me laisse vraiment froid sauf la vérité de la haine que l’on ressent à chaque coin de rue. Pas plus tard que dimanche dernier, la femme de Jacky, un copain du club cycliste, un "rouleur", un pas grimpeur du tout, la femme de Jacky, qui est venue boire le café, qui est bonne travailleuse et à qui je n’en veux pas le moins du monde, lorsque l’on a parlé de ceci et de cela, des enfants et de l’usine de son mari où j’espère que mon fils fera son stage de troisième, bref, la femme de Jacky, une femme honnête qui me rappelle l’une de mes sœurs ou même ma mère mais en moins méchante car elle ne l’est pas du tout, oui, la femme de Jacky m’a dit, en assez gros plan : "Et puis, avec tous ces étrangers...".

Je me suis demandé si elle savait que je vivais avec une chanson de Gainsbourg couleur café, et quand celle-ci est apparue, eh bien, ce fût tout sourire et bonjour et comment allez-vous et c’était sincère. Jacky mon copain malin avait embrayé rapidement sur les enfants et l’informatique et non, je n’initie surtout pas mes enfants à l’informatique - oui je m’y connais Jacky ne t’inquiète pas - oh ben quand même, Grosse, tu t’y connais, tu pourrais ? Oui mais non. Ils vont passer cinquante ans de leurs vies d’adultes devant la platitude des écrans, laissons-les faire de la pâte à modeler et des scoubidous. Oui t’as sans doute raison.

Puis dans ma tête : mes enfants sont-ils des étrangers ? Même la blonde ?

Puis tout se passe bien car tout se passe bien. Je ne sais pas si la femme de Jacky vote pour l’autre. L’enfer, c’est l’autre. C’est possible. Je ne sais pas ce que feront ces gens le grand soir du premier tour. Je ne sais pas trop quoi dire maintenant. J’ai juste précisé que je connaissais beaucoup d’étrangers qui travaillaient. LA PREUVE : les cuistots de tous les restaurants du centre-ville sont NOIRS.

Mais j’ai oublié que Jacky et sa femme ne vont jamais au restaurant, et que ça n’est pas son prénom, c’est juste un subterfuge dérisoire pour enfoncer le clou et ça n’est pas bien malin. Jacky s’appelle Laurent. Je m’en excuse : la vie réelle est bien plus simple. Pas la peine de peindre les plafonds, le blanc suffit à la perspective. Je connais aussi des Jean-Edouard qui se nomment juste Alexandre ou Maxime, ça dépend des générations. Mais il faut planter le décor.

Quand ils furent partis, j’ai vadrouillé dans ma tête. On dirait que je n’ai plus que ça à faire depuis que je perds vraiment la mémoire immédiate. J’aime bien Laurent parce que je sais qu’il serait là à trois heures du matin pour éteindre le feu à ma maison. Je le sais. Je sais aussi que d’autres ne feraient rien. Je sais que je peux compter sur lui. Je sais qu’il est franc du collier. Franc du collier.

J’ai ensuite pensé à cette collègue amoureuse d’un type qui l’a quittée.

J’ai pensé à une pétition en ligne pour un retour de l’amour, juste après avoir lu un article sur la pornographie en ligne dont je veux faire la publicité, parce qu’il me semble sociologiquement très vrai. Même si j’envisage avec ce vieux salaud de Konrad Lorenz l’amour comme un programme chimique et illusoire. Il vaudrait mieux entretenir la flamme que mettre le feu aux poudres.