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La vieille bigotte

lundi 16 juin 2014, par Grosse Fatigue

Ça recommence. Ça me rend fou. Seule une bafouille écrite à la va-vite me permettra de sortir cette image de mon crâne. Encore une fois, je n’ai pas eu le réflexe physique de lui allonger une gifle, voire un coup de poing, ou bien de l’étrangler tranquillement dans une ruelle adjacente, moi qui suis né bien après Stalingrad™. J’ai déjà relaté cette expérience fatigante auparavant. La voilà qui recommence. Une rue piétonne, un petit môme de cinq ans me posant des dizaines de questions sur la véracité des super-héros, la crédibilité de leurs super-pouvoirs et surtout mes préférences en la matière. L’atmosphère est légère et provinciale, les jeunes femmes sont encore jolies bien que de plus en plus grosses, la guerre est finie depuis longtemps et celles à venir semblent encore loin. Bien sûr, il existe des gens qui ont mal voté, mais je me contente face à mon fils si petit de relativiser, ce que je fais rarement, en diminuant le nombre de votants et le nombre d’inscrits. En un mot : je m’arrange avec les choses.

Et les choses me crachent à la gueule sous les traits d’une vieille femme maigre habillée comme à la campagne, détaillant sous les atours de l’immense surprise la différence évidente séparant le physique du père de celui du fils. Le père est blanc plutôt dans le genre blond autrefois et les yeux clairs, et le petit, d’après le regard de cette vieille femme, est un horrible basané, un Arabe en insulte et même pire : cette sorte de pollution, de calomnie, d’entorse faite à la race, et plus encore, de destruction de ce qu’elle considère comme un summum, moi-même, l’Aryen qui n’a rien demandé. La scène se joue en six secondes montre en main. Comme elle avance vers nous, son regard inquisiteur se porte du petit au père, puis du père au petit, en exagérant la surprise : elle ne sait rien pour Yannick Noah, et Barack Obama pas plus. Elle découvre que l’on peut faire des gamins à la peau foncée si tel est notre désir, elle feint de ne pas savoir à quel point la liberté nous irrigue, et ne sait que la maman du petit est infiniment plus belle que le mensonge qui l’irrigue depuis qu’elle est née vieille, depuis toujours sans doute.

Il faut se farcir ces bigotes de temps à autre. Celle-là, contrairement à l’autre, ne m’a pas craché de "petit bâtard" à l’oreille et c’est tant mieux : je ne l’aurais pas ratée. J’aurais fini condamné pour coups et blessures mais l’âme sauve face à mon fils qui aurait découvert le mal, le vrai, lors du réquisitoire mais aussi son père, résistant, super-héros. Tu vois petit : ça existe les super-héros.

Même contre une grand-mère ?

C’était une sorcière, tu n’as pas bien compris.