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Un grand moment d’impuissance

vendredi 21 février 2014, par Grosse Fatigue

Dans les grands moments d’impuissance me reviennent à l’esprit les jouets en bois et l’enfance. Ce fut le cas il y a quelques heures à peine, quand sur un trottoir l’ennemi s’est garé. Je connais son profil. Nous avons tous des ennemis, leur définition est simple : ils sont l’inverse de ce que l’on aime, et ont tendance à envahir ce qu’il nous reste. Ils sont nombreux et me rendent souvent fou : ils existent. Toujours est-il que, sur ce trottoir, j’avais en tête le sabre-laser de Luke Skywalker™ que dis-je ! J’étais Luke Skywalker quand le vaisseau s’est posé, mon ennemi, celui qui tout à la fois concentre Darth Vador, Marine Le Pen, le Chasseur, le type qui vit dans un pavillon, le fumeur, l’homme qui regarde la télévision, et ceux si nombreux qui considèrent le clignotant comme un ustensile trop altruiste pour être utile.

Bref, un amateur de football.

Envahissant mon espace vital - le trottoir - si soudainement qu’on aurait dit un pas fait exprès, le problème était à la fois dans l’attitude et dans la représentation : la seconde amplifiant largement la première. Attitude conquérante et antisociale, représentation de la voiture allemande coupée 4X4 énorme pour seulement deux places ridicules à l’arrière. Le genre de voiture qui signifie tout bêtement : je t’emmerde et tous les gens comme toi aussi. Une voiture qui en dit long sur l’état de nos sociétés, du simple fait que l’on autorise leur commercialisation, comme si l’inutilité de leur aspect ne pouvait pas nous ouvrir les yeux sur leur terrifiante dimension symbolique.

M’avançant une feuille et un crayon à la main vers la porte du conducteur, j’osais lui poser des questions humaines, pour confirmer mes doutes.

- "Bonjour, je peux vous poser des questions sur votre voiture ?
- Ouais vas-y mais j’ai pas trop de temps.
- Alors, question numéro 1 : Avez-vous un gros 4X4 pour compenser la taille de votre petite bite ?
- C’est quoi cette question putain ?
- Gardez votre calme, c’est Solange™ qui m’en a parlé.
- Tu connais ma femme abruti gauchiste ?
- Disons qu’elle connaît mieux ma voiture que votre micro-pénis.
- Qu’est-ce qu’elle t’a raconté ?
- Elle a tout avoué sur l’humanité troublante du beauf, dont vous êtes le symbole : vous compensez la taille de vos petites couilles par un gros jouet d’enfant qui écrase les gens-gentils sur les trottoirs. Il faut bien exister. Ne pleurez pas comme ça. (Le type éclate en sanglots, c’est humain).
- Eclater en sanglots, c’est humain ! Et puis ma minibite, c’est pas de ma faute ! Ça fait des générations qu’on bosse dans la chimie, alors tu comprends, perturbateurs endocriniens !
- Je comprends. C’est pour ça que Solange préfère ma bite : bio depuis des générations. On est d’origine italienne.
- SiFreddi, c’est toi ?
- J’en suis désolé.
- Putain je te casserais bien la gueule connard de gauchiste !
- Oui mais là, voyez-vous, vous n’êtes pas vainqueur !
- Je sais, j’ai vu. Qu’est-ce que tu vas faire ?
- Eh bien, ce n’est qu’un songe, mais il me semble que je vais découper votre bagnole en pièces détachées que l’on recyclera pour en faire des toboggans pour enfants dans le tiers-monde. J’ai déjà appelé Mittal™ pour lui faire une offre !
- Et comment je vais rouler pour aller au boulot moi ?
- Ben, avec votre micro-bite, vous n’aurez qu’à prendre un vélo. Au bout d’un moment, vous aurez tellement perdu votre bide que vous la verrez !
- Putain, la revoir, ce serait tellement bien !
- Allez, descendez voulez-vous, nous allons la découper ensemble !
- Ma bite ?
- Non, votre immonde voiture, cette grosse merde canine qui nuit au paysage urbain, au trottoir, aux petits enfants....
- Merci monsieur.
- C’est inutile : Solange m’a déjà remercié mille fois, avec ces cris si... comment dire ?
- Parce qu’elle crie ?
- Oui : il suffit d’éteindre le moteur."