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Chère actrice porno

mercredi 10 avril 2013, par Grosse Fatigue

Chère madame,

Je vous ai vue plusieurs fois depuis tant d’années. Vous avez commencé en crypté je bougeais la tête de gauche à droite le plus vite possible afin de rétablir la vérité sur Canal Plus quand j’arrivais à me faufiler les samedis soir chez des amis abonnés. A l’époque j’avais des amis réels que je pouvais toucher comme vous le comprenez bien, alors qu’aujourd’hui, je ne reçois même pas un email à part celui de ma voisine qui m’annonce que le lapin s’est encore échappé dans son jardin à elle.
C’est d’ailleurs pour cela que je vous écris car l’une des filles de la voisine, une grande brune très érotique m’a souri aujourd’hui et touché la main je ne sais pas pourquoi vous comprenez : je pourrais être son père - bien que sa mère me soit trop sympathique pour éveiller en moi autre chose que partage du thé en bon gentleman à l’anglaise.
Vous vous demandez sans doute pourquoi ce courrier et surtout pourquoi des phrases aussi longues n’est-ce pas ?
C’est que je trouve que dans votre carrière identique, vous avez un problème de rythme. C’est pour cela que j’ai arrêté de regarder du porno : la télécommande. Maintenant, on peut aller directement à la fin, et c’est toujours la même comprenez-moi. Je pensais que vous alliez changer le monde mais la fille de ma voisine s’inspire de vous c’est d’un triste, je crois qu’elle allume un peu ou alors je deviens mythomane ce qui est un signe de sénilité précoce je le sais j’en connais. Mais voyez-vous, ce qui a tué le désir dans l’œuf à coup sûr, c’est la possibilité d’accélérer à l’infini pour voir la fin. Les producteurs vos employeurs ont alors décidé d’inclure l’accélération elle-même dans le film, afin d’empêcher le spectateur d’utiliser la télécommande ou le pavé numérique qui lui permettra de voir la fin. Depuis que le porno est le secteur le plus influent d’internet, l’accélération est sans limite et votre secteur économique est lui-même menacé. Vous avez beau avoir recours à l’hypersegmentation comme un vulgaire producteur de yaourts, vous êtes en train de disparaître à cause de la vitesse elle-même. Il faut penser à une reconversion.

Mais j’oublie des éléments :

Ce qui est intéressant dans votre activité - et je le dis en tant que diplômé de l’université française en sociologie libérale - c’est votre influence. Non seulement la pilosité finissante a gagné jusqu’aux chiennes du Labrador, mais le système social de la pornographie est devenu le modèle global de la société tout entière. Je suis sûr que la fille de ma voisine baise comme vous depuis qu’elle baise - et si je le dis crûment, n’allez pas croire que je ne crois pas moi-même à l’amour, ôh si : j’aime mes enfants croyez-moi - donc la fille de la voisine baise à coup sûr (j’insiste sur ce terme) d’une manière aussi palpable que la vôtre et ; selon son degré de souplesse ; elle rejoint le prototype classique de la valse à trois temps, mais sans le chaloupé viennois : pipe - pénétration - fourrage anal si possible et crème chantilly. Trois positions sans prologue, un joli titre de film années soixante au lycée, menthe à l’eau au comptoir, odeur de Gitanes, non ?

Ainsi donc, vous allez disparaître parce que toutes les filles de toutes les voisines de tous les types dans mon genre vont tellement vous ressembler que nos futures érections ne se centreront plus que sur des filles romantiques et timides, voire même moches et mal foutues, car elles feront de la rareté l’objet de nos désirs. Pensez-y.

Je vous le dis très franchement : où allons-nous ? Rendez-vous compte : la fille de ma voisine ne se contente plus de me ramener mon lapin quand il s’échappe dans son jardin (c’est d’ailleurs une femelle mais je n’ose l’écrire tant on pourrait m’accuser de jeu de mots, ce qui est très ringard de nos jours). Elle me touche la main en souriant. Je suis un vieux flipper analogique elle a sans doute maté du vintage et vu les poils de mon torse sortir à travers le sous-pull tergal vert de mon enfance, qui me moulait jusqu’au nombril. Elle a juste frôlé ma main, elle est peut-être folle, ce qui en fait un personnage, ce qui en fait un personnage.

Madame l’actrice porno, comment en êtes-vous arrivée là ? Oui, c’est aussi ma grande question. Vos positions (à l’anglaise) sont-elles assurées par la montée du chômage et le confort du studio (hum) et sa supériorité à la rue, où l’on ne croise plus que des produits d’importation frelatés ? (Je passe devant en voiture, n’allez pas me dénoncer).

Qu’allez-vous devenir ?

Madame l’actrice porno, ne l’oubliez pas : vous avez un père, et ça pourrait être moi.

Bien à vous,

GF

PS : cette lettre-type peut-être copiée à l’envie, est libre de droit. Vous pouvez l’envoyer en changeant des mots à la femme que vous aimez. Mais dans ce cas, je n’y suis pour rien.