J’aimais bien cette chanson. Mon père me faisait croire que Nicoletta était un garçon, et moi j’en étais un, tout petit. J’aimais bien cette chanson bien que, déjà, j’avais l’impression que c’était un gros mensonge, de ces gros mensonges que les adultes balancent aux enfants pour leur faire croire que la vie c’est bien. Parce qu’enfant, la solitude, je connaissais bien. Je restais des heures à discuter avec une vieille lapine grise, dans une cage à lapin, en attendant que quelqu’un vienne me chercher pour (...)
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Impuissances
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La solitude Nicoletta
7 juillet 2015, par Grosse Fatigue -
Quelques jours avant l’été
15 juin 2015, par Grosse FatigueIl nous reste quelques jours avant l’été. Juste une ou deux semaines. Pas plus. Ensuite, l’été s’installe et l’année est finie. Je n’ai pas envie de faire le bilan de mes catastrophes intimes. Voir les gamins passer du rire aux larmes me suffit bien.
L’autre soir, les filles ont refusé de suivre leur mère dans la maison glauque de l’homme qu’elle aime. Je regardais la plus grande tancer la propriétaire de mes lieux, avec l’insouciance de ses treize ans. Maman, va-t’en. Mais va-t’en ! On ne veut pas être (...) -
J’aurais préféré te savoir morte
7 juin 2015, par Grosse FatigueDans les sous-bois alentour, nous avons fait du vélo et croisé des chevreuils et des sangliers. Dimanche matin de juin. Il faisait chaud nous étions bien. Nous avons parlé du passé avec un ami commun, de ceux que tu aimais beaucoup. Lui non plus n’a pas compris le pourquoi de l’abjection, de l’immonde, du pire. Nous en avons parlé mais c’est fatiguant d’en parler. Alors nous avons évoqué les enfants qui survivent même si, hier soir, les deux petits avaient les larmes aux yeux en me disant une autre fois (...)
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Et alors ?
30 mai 2015, par Grosse FatigueThéoriquement elle vient les chercher aux alentours de 19H45 le vendredi soir. Mais je l’avais prévenue : les filles veulent rester avec papa, papa c’est moi, et merci de ne faire ni scandale ni esclandre parce que les filles ne veulent pas te voir, parce que nos propres filles te détestent, parce qu’il faut peut-être leur laisser du temps. Tu ne prendras que le petit dernier, j’emmène les filles et le plus grand au théâtre des lycéens, on a déjà vu la pièce hier soir et c’est si bien le théâtre des (...)
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Je voudrais juste dormir
25 mai 2015, par Grosse FatigueJe voudrais juste dormir. Sans cachet, sans somnifère, sans les rêves qui interfèrent. Je voudrais dormir. C’est douloureux maintenant. Les rêves me rappellent à l’ordre, de cet ordre des choses antérieures où tout allait bien, puis ils glissent systématiquement vers le cauchemar. La femme de ma vie d’avant-hier est radieuse et souriante, et se moque de moi en partant pour un autre. Combien sommes-nous à faire ce rêve entêtant ?
Il y a quelque part un ordonnateur des rêves. Ce rêve, je l’ai fait (...) -
Elle n’est jamais venue ici
24 mai 2015, par Grosse FatigueJ’ai parlé à l’ex-femme de ma vie dans sa voiture vendredi soir. C’est la mère de mes enfants mais je ne peux plus la voir. Je lui ai dit il faut qu’on parle parce que les enfants vont mal si tu pouvais arrêter de leur faire ça ce serait bien. J’ai pris sur moi dans la guerre de merde qui nous tue à petits feux parce que je n’ai peut-être que cela pour me consoler d’avoir perdu tant de temps. J’ai un souvenir vague de ma conversation avec elle. Je lui ai dit les filles te détestent. Les garçons n’avancent (...)
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Mélanome
7 mai 2015, par Grosse FatigueIl m’a envoyé un SMS : c’est plus silencieux. Nos conversations minimalistes évitent l’enthousiasme ou le dépit. Et puis il habite loin de chez moi, et il sait sans doute à quel point je m’inquiète de l’injustice cancéreuse. C’est mon neveu. On lui a enlevé ce que d’autres appellent des grains de beauté, les néophytes, les non-initiés. L’année dernière, il avait une cicatrice profonde dans le dos, un coup de charrue, une vie sauvée.
Son silence des dernières semaines ne m’a pas perturbé : j’avais d’autres (...) -
Retrouver le sommeil : Stalingrad
5 mai 2015, par Grosse FatigueJe ne dors plus. Depuis Noël. Le plus grand a dit à l’époque : "C’est le dernier Noël en famille". Et je n’ai pas dormi depuis. Du moins pas normalement. Je rêvais de dormir jusqu’à la mort. Maintenant, je rêve de dormir. Car il y a un univers en moi, un pays des merveilles, une cartographie des rêves, qui s’est bâtie depuis mon premier cauchemar.
Mon premier souvenir est un cauchemar. Mes parents me perdent en forêt. Le coffre de la Citroën ID break se referme. Dans la forêt sombre, l’angoisse me prend, (...) -
Une pute et un clodo
24 avril 2015, par Grosse FatigueJe rentrais à pied l’autre soir dans la douceur du réchauffement climatique occidental. Fin des saisons classiques, il faut s’habituer à la précocité de tout, il faudrait presque en redemander. Les rues sont vides. Les habitués ont déserté la ville et sont rentrés chez eux. Il doit y avoir une série sur la une. Le grand boulevard de l’après-guerre et des B25 américains est rectiligne et contraste avec ce qui reste de la vieille ville que je viens de quitter. Au coin d’une rue subsiste une grosse bâtisse (...)
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De petites vies
21 avril 2015, par Grosse FatigueNatacha, la secrétaire, discute avec moi. Je l’aime beaucoup Natacha, elle aime l’astrologie et les chiens, elle est un peu hystérique, on rigole bien, je lui passe des livres de Dugain, ça rime bien. Parfois, on boit un café ensemble avec les autres secrétaires, on change le monde, en espérant une réincarnation plus favorable et un bac plus prestigieux.
Car Natacha comme d’autres aurait des ambitions plus grandes, même si depuis dix ans, elle se contente comme moi de se plaindre de nos vies (...)