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Et pour tes enfants ?

mercredi 30 mai 2012, par Grosse Fatigue

Ils me disent tout le temps, et pour tes enfants, tu veux quoi ? Ah la belle question. Je pourrais leur dire que j’espère que les mômes échapperont à leurs parents comme j’ai échappé aux miens. Les miens qui disaient que j’arriverai jamais à rien et que la vie m’apprendrait... Je ne sais pas trop ce que la vie était sensée m’apprendre. A faire la guerre comme mon père, la seconde, ou le ménage comme ma mère. Mais pas à jouer de la guitare ou à faire du sport. Ou n’importe quoi d’autre que détester les gens pendant vraiment longtemps. Et puis vient juin chaque année. Le moment tant attendu, quand l’humidité de l’air du matin et la rosée tiède annoncent les orages à venir, des filles inconnues sous des douches d’eau douce improvisées, des gouttelettes sur leurs frissons et le réconfort tardif d’un vin rosé dans une bourriche vide, attablé à un guéridon de vieux bar d’avant les fast-food, à regarder les mêmes rhabillées flâner en rêvant devant la capacité d’innovation des marques espagnoles de prêt-à-porter dans le Marais, pour faire chic. Etc. Etc.
Alors ils m’interrompent et me disent à nouveau : "Mais pour tes gamins, tu veux quoi ? Normale Sup ? Polytechnique ? HEC ?".

Mes amis sont parfois standardisés.

J’imagine que mes enfants auront la belle vie s’ils n’ont jamais à se soumettre à des cons. C’est quelque chose ça. Se soumettre à des cons. Les ordres absurdes du quotidien et de la routine, la paperasse permanente même dématérialisée, l’endogamie du métier, la monotonie fonctionnelle des gens obéissants. Que faire pour éviter le pire quand on aura nous-mêmes échappé à tout cela en étant bel et bien mort ?

Un crayon une gomme et de la gadoue pour les petits. Le plus petit, c’est la gadoue. Du bonheur. Un peu de terre deux verres d’eau et trois feuilles d’érable, il y en a pour la journée. Personne pour lui dire de faire la chose autrement : il n’y a pas de hiérarchie dans l’idée de la gadoue. C’est la création simple, divine et légère. Les jouets en plastique et les dessins animés en produits dérivés s’éloignent du paysage, aussi vrai que l’on éteint l’écran. Il faudrait que ce sérieux-là dure toute la vie, mais il faut aussi travailler et aider les autres à devenir eux-mêmes, quelque chose dans ce genre.

Mes amis me disent que tout ça ne va pas être très facile, qu’il va falloir faire des choix, prendre des décisions, passer des concours. Ils me disent aussi que bientôt, je n’aurais plus aucun poids et que la vie m’apprendra.

Mes amis me rappellent mes parents.