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Putain de chiens

mardi 12 janvier 2016, par Grosse Fatigue

Ce matin dans le noir dans la vallée de la gare, cette destruction reconstruite d’après la guerre d’autre fois, dans le noir, enfin bref la brume, j’ai vu deux chiens à la fenêtre d’une maison autrefois habitée par des gens normaux. J’ai compris. C’est aujourd’hui le jour du jugement dernier, je suis encore ensommeillé, je vais au travail prendre mon train, je vais voir une vieille femme décatie comptable dans le fauteuil d’en-face, mais je vois des chiens à la fenêtre d’une vieille maison, et je les vois fiers. Une juge la trentaine va statuer sur la véracité de mes propos et sur mes qualités de père, et sur les mensonges de leur mère, une jeune femme va juger de ma vie et de ce que je suis et franchement, je n’aime pas trop avoir vu ces deux chiens à la fenêtre haranguer les voyageurs et se foutre de ma gueule dans leur regard j’ai bien vu le même regard que dans l’amour porté par l’amant de ma femme à la mère de mes enfants, ce regard servile et carnassier, le regard du clébard, j’y ai vu comme un signe, mais j’étais fatigué et je chantais dans ma tête à l’intérieur Diamond Dogs parce que j’adorais l’album en quatrième je le mettais en boucle, c’est-à-dire que je remettais le diamant sur la première plage et raconter ça aux gens d’aujourd’hui et c’est la ruée vers l’or, avec pistolet magnétique pour retrouver sous le sable des pierres précieuses peut-être alors que je ne parle que d’un trente-trois tours que j’ai encore putain, faut tout vous expliquer les gens, tout !

Bowie est encore mort ce matin et je sens que ça va durer, comme pour Leonard de Vinci ou Pierre Desproges ou Jacques Brel, bien sûr que les cimetières sont pleins d’irremplaçables, Michel Fugain avait tort alors tiens-toi bien putain, tu vois bien que dans ma tête : ça boue. Ça bouillonne.

Les deux chiens se tenaient debout derrière la fenêtre ouverte malgré la noirceur de l’humidité qui fait les noirs profonds et les reflets, et les flaques dans les caniveaux. J’ai compris ce qu’ils me voulaient ces deux chiens, ils voulaient nous signifier la fin, la planète des singes ce sont eux : putain de clébards qui chient partout et transforment leurs maîtres en punk à pour peu qu’ils soient enfants de salauds ou fils de putes puisque ça pullule aujourd’hui. Les chiens vont nous bouffer, en rillettes démentes en pâtés de maison, en maison, Bowie avait raison, il faut se méfier des chiens comme d’autres des cochons et je sais ce que nous réserve 2017 : l’ouverture des chenils, du petit commerçant au prolo de souche, au fonctionnaire qui n’en peut plus, on avait déjà les chiens fidèles qui se tournaient vers là-bas pour mieux ne pas nous offrir leurs filles, voilà que les chiens de souche salueront de leurs crachats la scène initiale du vote second tour : de la merde sur les trottoirs, mais pas que.

Et pendant ce temps-là, des emmerdeurs dessinent Charb ou Wolinski sur un nuage attendant Bowie en plusieurs figures, comme si tout cela et cette imagerie d’Epinal pouvait nous sauver des chiens qui viennent se lécher dans leurs partouzes d’extrême-droite en attendant leur heure.

Tout arrive et c’est bientôt. Il faut courir plus vite qu’eux en attendant l’orage.

Que l’on me pardonne mon soulagement.