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Eleveur de porcs

jeudi 23 juillet 2015, par Grosse Fatigue

Oui moi aussi je devrais élever des porcs au lieu d’élever mes enfants au rang de musiciens quelque chose comme ça. Sur la route en vélo, selon le vent, on les sent venir les porcs, dans les bâtiments fermés murés claquemurés, avec un silo dans un coin, pour assurer fordisme oblige, une alimentation juste à temps (SIC). Ça pue et pas qu’un peu, ça pue la mort et ça se retrouve en cellophane dans mon caddie™ trois jours après, même si ça vient d’Allemagne ou de ne je sais quel mensonge, je mange du jambon parce que c’est pratique, comme la vie actuelle en général.

Oui, je ferais mieux d’élever mes enfants comme des porcs, à parodier le titre de "Vivre et penser comme des porcs", un livre qui m’avait marqué bien avant l’heure, à l’époque où tout s’aggravait déjà mais le pire est avenir.

L’avenir sera pire. C’est ce que je m’évertuais à dire à l’éleveur hier matin, en riant, parce que j’avais fait quatre-vingts kilomètres d’été avec des cyclistes de tous les âges, dont le père d’un copain de mon fils, qui sans doute s’emmerde tellement avec sa femme qu’il court autour du Mont Blanc et que ça fait de lui un sacré grimpeur. On fait ce que l’on peut pour tuer le temps. L’avenir sera pire. L’éleveur qui voulait faire flamber des pneus à l’entrée de notre patelin, gavé de subventions européennes et d’un protectorat tous azymuts depuis tant d’années, ne comprend pas ce dont il bénéficie : lui aussi fait ses courses chez Leclerc™ char d’assaut et voilà-t’y pas qu’il est très content d’acheter ses céréales à prix coûtant comme on dit vu qu’il n’en fait plus des céréales. Il fait du porc ou du mouton, c’est pareil à vrai dire. De la barbaque qu’on découpe à cinq heure du mat’ été comme hiver dans les abattoirs froids et gris des villes moyennes. Il se plaint de tout et ne sait pas vraiment de quoi. Les automobilistes aimeraient bien retourner à leur train-train sans entrain, boulot quotidien. Mais le voilà leur interdisant de bien vivre lui qui vit si mal, à me bouffer l’air quand on roule, à me farcir de plastique quand les enfants ont faim, le voilà qui réclame pour lui-même le même droit que les autres : gagner de l’argent. Oui mais c’est la déflation et ça arrange tout le monde. Tu peux bien brûler des pneus pauvre con, tu avoues au moins par la gestuelle que tu te fous de l’environnement et des retombées noires et de la suie collante. On sait que, comme tout le monde, tu détruirais bien le monde tant qu’on te paye ton porc au prix estimé, qu’importe si la Chine ou l’Allemagne ou je ne sais où n’en veut pas !

De quel droit interdis-tu le passage aux gens, toi qui n’est pas de gauche ? De quel droit penses-tu que cela nous intéresse encore quand tu as l’indécence de nous montrer la taille de ton tracteur : oui, c’est la taille que les tracteurs avaient dans mes yeux d’enfant il y a quarante ans ! Quelque chose cloche. Question d’échelle : celle que tu utilises pour y grimper.

Cher éleveur productiviste : ne compte pas sur moi et va te faire foutre avec ton tracteur et tes cochons. Essaye de nettoyer ta cour et de replanter des haies. Fais quelque chose de ta vie avant que le cancer ne fasse quelque chose de la tienne. Cultive bio et ferme ta gueule. Revends ton tracteur à des Américains et n’essaye plus de faire comme eux - Futuroscope ou Puy du Fou - allez, rentre chez toi et désherbe à la main, s’il reste un peu d’herbe.

Alors, et alors seulement, j’irais peut-être te prêter un coup de main.

Pauvre con.