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L’art contemporaire

mercredi 13 mai 2015, par Grosse Fatigue

J’admire les artistes qui, dans la rue, font de jolies choses. Je me demande à voir leurs œuvres ce qui a pris à qui je ne sais pas d’encenser Andy Warhol, la laideur du temps lui va si bien. Sans doute de riches Américains ayant besoin de combler le vide des pans de murs de leurs villas californiennes. Dans certaines villes, des types peignent des rues entières de couleurs vilaines et parfois, au milieu d’un tourbillon, le portrait d’une jeune fille ou un fantasme pinkfloydien. Je conserve mon appareil-photo pour en garder les traces. Ces types acceptent de repeindre sempiternellement leur œuvre comme autant de palimpsestes modernes dont on aurait perdu le sens. Seule reste la photo. Chacune de ces œuvres est temporaire, comme ces fleurs qui ne durent pas, ces insectes qui meurent le soir de leur naissance.

Etrange.

A l’époque où tout se jette.

On aimerait les conserver.

J’ai alors l’envie d’en faire des tirages géants. Il me semble que ces types qui ne gagnent pas leur vie valent mieux que cent mille Légions d’Honneur de leçons qui broieraient du noir à la Soulages, cet usurpateur subventionné, ce synonyme d’absence de talent, cet épuiseur de filon pourri. Pourquoi lui et pas eux ?

Parce qu’ils n’ont pas de contact, de réseau, d’ambition, parce qu’ils vivent à la marge, voire de l’autre côté, à la Van Gogh, avant que les galeries ne les repèrent, les formatent et les proposent au marché à coups de petits fours et d’entourloupe, jusqu’à découper les murs de parpaings sur lesquels ils se sont commis d’office, fantasmant à la bombe des couleurs vives et d’improbables personnages futuristes. La cote montera, la cote d’alerte, ils seront repus, mais combien d’entre-eux ?

J’ai envie d’en embrasser quelques-uns. Et pourtant, les premiers tags, je les trouvais moches et prétentieux, et dérisoires et presque sales. Mais aujourd’hui, dans nos rues sans mélancolie, voir surgir un portrait ci-joint, me remplit de joie et parfois de cet espoir que l’on devrait refuser tant il repousse au lendemain ce que l’on pouvait aimer hier. En art, il faut aimer ce que l’on veut et faire la sourde oreille. Il reste des sensations, de l’émotion et du travail à la main, la seule valeur possible, l’œil et la main, l’artiste et rien d’autre. Foin des installations vidéo d’improbables donneurs à voir, les murs nous parlent encore, il faut ouvrir l’œil et dresser l’oreille. Merci les artistes. J’espère que personne ne m’en voudra de publier deux petites photos volées. Sinon, que l’on me prévienne.