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Ne fais pas psycho ma fille.

lundi 15 septembre 2014, par Grosse Fatigue

Je suis sensé travailler sur un cours imminent mais je repousse le plan comme on repousse le dernier verre : de toutes façons, il faudra partir. Ce matin, j’ai discuté avec le chef du département. Il m’a dit qu’il a la trouille. Car son fils est en seconde, et qu’il ne brille pas en maths. Il me dit : "Et t’imagines s’il veut faire psycho ?". Ce fut le blanc.

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Je pense qu’au pire, autant faire littérature. J’ai écouté Roudinesco dans La Tête au carré, et franchement, les psys, c’est l’art du vide. J’insiste et j’admire en même temps : l’art du vide. Relire Lacan, qui n’a rien écrit, si ça n’est pas l’art du vide ! Et l’on peut même raconter n’importe quoi, Freud défendant les homosexuels, par exemple.... Je ne mets même pas de lien sur le podcast™, personne n’a assez de temps à perdre à l’heure où l’on se demande où est passée la matière noire, une vraie question. J’ai repensé au fils de mon ami, et à mes enfants qui, hélas, ne brillent pas non plus par un sens mathématique profond. En cela, ils tiennent de leur père, et mon éducation est un désastre. J’en ai honte et je m’excuse, fermez la parenthèse.

En allant acheter pour la troisième fois le "Dictionnaire critique de la sociologie" en hommage aux deux provocateurs qui l’ont écrit, j’ai vu des filles qui faisaient psycho, le même jour, au rayon du même nom. Elles n’étaient pas BCBG, elles n’étaient pas vraiment sales non plus, elles avaient un certain profil incertain pour faire psycho. J’ai eu des cours communs avec des filles qui faisaient psycho autrefois, rien ne change vraiment.

Je les ai observées, elles trituraient les bouquins au programme, de gros bouquins pour mieux connaître les gens de l’intérieur grâce à des expériences absurdes dans des laboratoires américains. Je sais que ces filles-là ne retiendront rien de tout cela dans dix ans. Ça leur passera au-dessus de la tête. Et c’est normal.

Pour connaître le monde, autant lire un bon roman. Dans un bon roman, il y a tout, c’est pour ça qu’il est bon. Contrairement à un bouquin de psychologie - voire un dogme de psychanalyse, pour entrer dans la secte - les bons romans n’utilisent pas de gros feutre pour grossir le trait. On apprend entre les lignes, on comprend par hasard. Il n’y a pas de schémas mentaux, pas de flèches, pas de diagramme et surtout, horreur de l’horreur, de statistiques. Car nous mourrons tous de statistiques aujourd’hui, car il faut être crédible.

Ne fais pas psycho ma fille, tu perdrais les meilleures années de ta vie. Pour devenir institutrice, fais plutôt lettres. Ça ne sert à rien, mais, peut-être découvriras-tu le plaisir de lire. Ça n’a pas de prix.