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Ma bite est morte

lundi 4 août 2014, par Grosse Fatigue

Ma bite est morte ce matin. A vrai dire, ça fait trois mois qu’elle est comme ça. Ça ne prévient pas quand ça meurt, ces machins-là. J’y pensais en faisant du vélo ce matin. Il y a bien longtemps que nous n’avions pas eu de conversation elle et moi. Il faisait beau dans les bois. Elle a toujours détesté la langue de bois. Mais cette fois, elle ne répondait pas. J’avais beau être tendu vers l’effort et détendu de quoi vous savez, aucun message ne parvenait. D’autres mots me venaient à l’esprit en pédalant, mais c’est dur de prendre des notes en conduisant. Elle reste recroquevillée. Pas d’éruption matinale. Par d’éructation nocturne. Elle ne désire plus que ma femme, la mienne, celle de ma vie, comme un chien sa niche même si l’image est peu flatteuse j’en conviens. Autrefois, elle se dressait à la moindre bimbo, même avec trente ans d’écart. Et puis l’âge l’a rattrapée, comme un hérisson sur la chaussée. Il n’en reste rien qu’un escargot sec, qui attendrait la pluie d’un printemps improbable.

On a l’air con elle et moi.

Même seul devant le miroir où je me rase en ne pensant à rien, elle se met à chanter mon manque d’ambition, ma façon de baisser les bras. Elle préfère conjuguer d’autres mots dont j’ai perdu le lexique à force d’Espagnoles, de Mexique. Putain c’est dur de n’avoir plus rien à dire à sa bite, d’être comme un vieux en cage, avec ces filles qui s’affairent à la faire monter en l’air, une sorte de cambrioleuse, de monte-en-l’air, mais c’est inutile, désuet : c’est solitaire.

Autrefois, je passais mon temps avec elle. Le temps de l’imaginaire inaugurait l’avenir, des femmes fatales fantasmées. Puis les femmes du passé comblèrent les manques. Puis les femmes des autres. Puis les inconnues de tout le monde. Et plus personne. Elle est presque sèche, comme lyophilisée, il faudrait la tremper pour voir le bout du tunnel mais je me méfie de ce genre d’expression, qui sait si l’on verra l’horizon à la sortie, ou bien un lac qui déborde, une voiture qui cabriole, oui, je me méfie des tunnels. Et puis l’eau pourrait être brûlante, on ne réveille pas nos âmes mortes, pas plus que les Poilus dans les tranchées cent ans après. C’est la vie c’est ainsi : on meurt d’abord par la bite et, quand tout va bien et trente ans plus tard, par le reste. Même si les animaux dans les fossés meurent puis pourrissent par l’anus, j’espère ne pas en arriver là, il nous reste ébola, cancer, etc.

Elle se met à sourire. Pas du genre à bavasser. Elle et moi, nous détestons les camps de naturistes. Car comme l’habit fait le moine, l’habit fait la bite et le désir qui va avec. Elle n’oserait se montrer en public, elle est pudique bien que moribonde. Elle sait que c’est la surprise qui fait la tension, et les filles habillées et les bretelles de soutiens-gorges ou de maillots de bains, inversement proportionnelles à la taille du bonnet. Là, elle savait se montrer digne. Elle aimait aussi la trace du maillot, car elle prouvait ce que l’on cachait, et donc le privilège du dévoilement.

La voilà tombée et sèche.

Je vais chercher de la superglue™. Sait-on jamais ?