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En rester au portrait amateur

jeudi 29 août 2013, par Grosse Fatigue

J’ai déjà eu du mal à passer à la photographie numérique. Maintenant que je m’y suis plus ou moins fait, j’ai du mal à passer au marché de la photographie numérique.
Je découvre sur un site l’existence publicitaire d’un logiciel de portrait. Un logiciel dédié au portrait, capable de penser pour le photographe ce qui fait la force d’un visage. Encore une extension pathétique de nos impuissances, une prothèse numérique palliant la disparition de l’imagination, elle-même sans doute restée dans les temps analogiques où la culture et la fantaisie suffisaient à l’art. Le temps d’avant Jeff Koons, commerçant financier ayant compris que le marché de l’art est composé de clients parvenus et grotesques.

La chose pourrait en rester là, et les vrais photographes, les sensibles, n’iraient pas surenchérir dans le logiciel, se cultiveraient l’œil avec de vieux livres, et donneraient aux jolies rousses à taches de rousseur des portraits inoubliables à croquer.

Oui mais non.

Car la publicité pour ce logiciel de portrait non-amateur (Lecteur, tu trouveras sans doute) présente justement - entre une Noire à boutons et une gamine obèse - une rousse à taches de rousseur, comme j’en ai connue une aux Sables d’Olonne aux alentours de 1983 avec laquelle j’ai cru pouvoir découvrir les joies des rousses avec taches de rousseur mais bon. J’en garde la même frustration que d’avoir raté la truite arc-en-ciel un dimanche avec mon père dans le ruisseau solognot qui me servait d’exotisme. Car comme la truite arc-en-ciel, la rousse à taches de rousseur est rare dans nos contrées, et je n’ai pas visité l’Irlande qui, paraît-il, en produit beaucoup.

Le logiciel vante donc la disparition des taches de rousseur. Si je comprends relativement bien la disparition des boutons d’acnée, j’ai un mal fou avec les taches de rousseur. Il faut bien le dire :

LES TACHES DE ROUSSEUR, C’EST BEAU.

Surtout sur les visages des rousses et sur leurs seins. Du moins dans mon souvenir.

Tout cela ne pourrait être qu’une bavasserie de plus dans l’esprit vieillissant d’un obsédé sexuel.

Oui et non.

Car ce type de logiciel, au prétexte de lisser le monde à travers la peau des rousses ou les rides d’un homme de mon âge, nous fait croire que le monde est, non seulement ainsi fait, mais qu’il DOIT l’être. Je sais qu’il ne faut pas abuser des majuscules, mais il me semble important de prévenir les parents d’aujourd’hui afin que les filles rousses à taches de rousseur sachent qu’il n’y a pas si longtemps, nous étions nombreux à les rechercher sur les plages dans l’espoir de savourer leurs épidermes mouchetés. Aujourd’hui, un tatouage vieillissant fait mieux l’affaire. Sale époque.

Si vous connaissez une rousse à taches de rousseurs, ou si vous êtes vous-même rousse à taches de rousseur, n’hésitez pas à m’écrire, il me reste un Nikon FM2 chargé en Tri-X. (Les amateurs comprendront, les professionnels iront se faire foutre).